Nous sommes le 11 Novembre 1940. Deux semaines plus tôt, Pétain et Hitler se sont serré la main, et la France est entrée en collaboration. Paris est occupée depuis près de 6 mois, et depuis quelques jours, les autorités d'occupation ont annoncé que ce jour serait un jour travaillé comme tout autre, et toute manifestation est interdite. 

Depuis une dizaine de jours, des tracts appellent les "Etudiants de France" à venir "honorer le soldat inconnu" pour que le "11 Novembre 1940" soit "le signal d'une encore plus grande victoire" contre "les autorités opprimantes". Ces tracts sont recopiés à la main et diffusés. 

Ce sont donc près de 3000 étudiants, lycéens ou jeunes actifs qui se rassembleront sur les Champs Elysées ce 11 Novembre pour chanter La Marseillaise, célébrer de Gaulle et plus globalement montrer leur attachement à une France Libre et leur opposition envers l'occupant.

Près de 1 sur 10 a été arrêté, et la plupart sera encore en prison une semaine plus tard. L'Université de Paris et tous les établissements d'enseignement supérieur sont fermés dès le lendemain et le resteront entre une et six semaines. Pour éviter toute reprise des manifestations, plus de 1000 étudiants sont arrêtés pendant cette période, et le quartier Latin est fortement surveillé par l'occupant. 

C'est dans ce cadre que sort cette affiche de propagande l'année suivante en 1941. On l'a vu, les étudiants sont fortement surveillés, et sont globalement considérés par les allemands comme des résistants. A cette époque la Faluche est un attribut connu et reconnu de l'étudiant.

L’auteur de l'affiche, Marcel Mars-Strick, utilise les principes de la bande dessinée pour tourner au ridicule l’action des résistants français. Elle est intitulée Planche de propagande pour la protection de la santé publique et se place comme un des moyens de "lutte contre les maladies mentales". L’idée est de démontrer l’incohérence de la Résistance manipulée par des intérêts antifrançais (juifs, franc-maçons, anglais, russes, ...) et rendant fou ceux qui la soutiennent. Il appuie sa démonstration sur un jeu de mot rapprochant le nom "De Gaulle" au qualificatif "dingot" et appelle "Dingau" tout ceux qui en sont affublés . En clair : il faut être dingot pour suivre De Gaulle !

C'est donc tout naturellement que l'étudiant prend place sur cette affiche de propagande et qu'il y est représenté avec sa Faluche en train de taguer et dégrader l'espace public.

La Faluche, en tant qu'attribut permettant simplement de déclarer son appartenance au monde estudiantin français, porte aussi des valeurs de fête, de railleries et d'opposition "au bourgeois" qu'elle aime surprendre ; ce qui n'était pas forcément vue d'un très bon oeil par l'occupant. Cependant, elle n'était pas interdite sous l'Occupation et on sait que des événements étudiants étaient organisés lors desquels elle était portée. Par exemple, elle fut portée par les étudiants parisiens "de manière habituelle" à l'Université peut après la rentrée de 1942. De même, l'Association Générale des Etudiants de Limoges a pu organiser la Semaine de la Faluche en 1943 au profit de l'étudiant prisonnier. Ce sont les étudiants eux-mêmes, dont la faluche était presque un synonyme, qui étaient très surveillés, en tant qu'intellectuels, car globalement hostiles à l'occupant. 

Sources : Wikipedia, faluche.info, Conopée Amiens
Merci à l'artiste Commandant RoSWeLL pour cette découverte et à Hervé Giraud d'Estudiantineries pour sa relecture

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